Pouvoir faire écrire des les trous

Publié le par Rémy

L’écriture romanesque est une écriture créative. Je crois qu’il n’y a personne pour réellement parvenir à défendre le contraire. Mais si l’écriture de roman est un acte de créativité pour l’auteur, la lecture romanesque n’est pas nécessairement créative, je ne suis même pas sûr qu’elle le soit. Bien sûr il est possible pour le lecteur d’anticiper sur l’identité d’un coupable dans un thriller ou sur le dénouement d’une histoire d’amour mais dans ces cas là on ne peut pas prétendre que le lecteur fait preuve de créativité, il est plutôt le jouet de l’auteur qui aura plus ou moins parsemé son livre d’indices et de pistes. Mais je ne dis pas cela comme une critique, c’est un des paradigmes de l’écriture romanesque qui repose sur un accord tacite entre auteur et lecteur qui présuppose que le premier va emmener l’autre dans son histoire ; les deux sont consentants sur la nature asymétrique qui les unis le temps d’une lecture.

Je pense à cela parce que je suis un joueur de jeu de rôle, et qu’un joueur de jeu de rôle et assez souvent un lecteur de jeu de rôle. Or si les jeux de rôle sont très rarement de la bonne littérature, ils possèdent une force inouïe par rapport aux romans, c’est que leur lecture est normalement capable d’amener aux lecteurs outils et inspirations créatrice. Pas simplement comme un film ou un roman que l’on aurait envie de s’approprier en l’adaptant en jeu de rôle, mais bel et bien de créer une fiction dans les canons du jeu en question. C’est comme un roman qui donnerait à son lecteur les outils pour écrire des suites, des spinoffs ou simplement des nouvelles s’imbriquent parfaitement avec le canon que le roman pose.

Bien sûr tous les jeux de rôle de réussissent pas cela, mais il en va des œuvres de jeux de rôle comme de n’importe quelle création artistique, il y en a des bonnes et d’autres qui sont ratées. Mais quand cela fonctionne et que le jeu est réussi, alors sa lecture transforme le lecteur en machine à projeter des ses propres narrations au sein même d’un univers de base, avec des codes qui rendent l’ensemble œuvre originale et créations secondaires parfaitement cohérentes. C’est cette mécanique qui m’a toujours fasciné.

Écrire est une chose. Écrire des histoires est une chose, un partage. Mais écrire et inspirer l’imagination des autres à poursuivre nos écrits de base tout en lui donnant les clefs d’une production ultérieur c’est un sentiment fou. C’est peut-être ce que Dieu éprouve lorsqu’il regarde les hommes créer au sein même de sa propre création. De manière plus prosaïque cela me donne la sensation d’avoir su faire percevoir le non-dit et le hors champs du récit. Produire un univers suffisamment large et cohérent pour accueillir en son sein d’autres narrations que la mienne. Donner à lire et percevoir cet univers de manière suffisamment fragmentaire pour que chacun puisse y percevoir des espaces où loger ses propres idées c’est ce que je cherche toujours à faire.

C’est ce que je voudrais savoir faire.

C’est je suppose ce qui m’a été légué par mes lecteurs de jeux de rôle.

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