Des personnages morts

Publié le par Monsieur C

Je crois et j’ai toujours cru que l’on faisait tous la même chose, persuadé que vivre c’était s’inventer des personnages. Je ne suis pas écrivain, écrire ce n’est qu’un moyen, qu’un outil, et je ne suis pas un outil. Ce que je suis c’est démiurge, une façon de me nommer créateur mais avec une plus value de classe et d’exotisme mystique.

Du moins démiurge c’est ce que je serai lorsque j’aurai surmonté les murs implicites de mes prisons névrosées. Je n’ai jamais su faire qu’une chose, inventer des personnages, pas ceux que l’on écrit pour des romances adolescentes, mais ceux que l’on campe quand on espère toucher les seins d’une romantique adolescente ; ces personnages que j’observais chez les autres, qui passaient, trépassaient, ces personnages que les rouages sociaux feuilletaient en ce foutant de savoir s’il y avait une once de véridique dans ces pitres grotesques. La seule chose dans laquelle j’étais capable c’était discerner puis verbaliser les personnages des autres ; moi je n’en étais pas un, moi je n’étais personne.  J’avais mille personnages intérieurs mais aucun n’avaient le courage de prendre le contrôle de notre vie.

C’est ainsi que je me suis retrouvé à écrire, par hasard. Non, même pas par hasard, pas plus que par nécessité. Ecrire c’était un dommage collatéral de ma pensée. Il m’aura fallu des années, assez pour dépasser la décennie, avant que je n’envisage qu’écrire pouvait être une fin.  Avant d’admettre cela  je créé mes personnages, et je pensais que tout le monde faisait cela, ça n’avait alors pour moi aucun sens d’y voir autre chose qu’une sale manie.

Un jour je comprendrai qu’écrire c’est aussi cela. Mais d’ici là je jalouse ceux qui osent, bons ou moins bons que moi je m’en fouts, j’admire leur audace à supplanter leurs esprit critique pour exprimer l’imperfection de leurs pensées, de leurs personnages et moi je meurs étouffé sous un monceau de cadavre de personnages, vécus, fantasmés, écris, envisagés. Je jalouse ceux qui reviennent de là. Et je jubile pourtant d’y être.

Publié dans Je est un Blog, écrire

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