Joker alias la nuit est bleue comme un mirage
On s’attache à la valeur de nos névroses et lorsque je dis je devrais dire je et ne parler qu’en mon nom. C’est peut-être ce qui fait de l’écriture, de la posture de l’écrivain, une parole salvatrice parce que le je d’écriture est un je polymorphe, le jeu de l’écriture est un on à multiples facettes qui lorgne toujours un petit peu vers la psychopathie parce que le on de l’écriture comme le je, le il, le elle, le nous, le vous tendent toujours à noyer des poissons mais dans ce voilement de la vérité qui dérobe aux pronoms leurs valeurs désignatives l’auteur et le lecteur d’un accord commun même s’il reste tacite gagnent tous les deux en liberté. Alors oui le je que je suis s’accroche encore trop à des habitudes dont je ne discerne plus si elles sont des névroses, des traits ou des hasards du goût. Mais de plus en plus j’en ai la conscience qui s’ébranle, le vernis qui s’effrite et la pensée qui s’agite. C’est un progrès je suppose, savoir saisir en soi ce qu’il faut sauver pour se débarrasser du reste ; moi qui garde tout, qui accumule et cumule les objets, les fidélités et les forces de pensées … si j’avais su qu’un jour il me faudrait écrouler tout cela pour renaître comme le château de cartes que l’on reconstruit après qu’il se soit écroué sur la table.