Petitesse et étroitesse de la parole militante

Publié le par Rémy

Aujourd’hui il m’est de plus en plus difficile d’écouter un discourt militant sans éprouver la même aversion que lorsque j’écoute un discours politique. Et pourtant, bien souvent les deux sortes de discours s’opposent, la parole militante répondant souvent à une parole politique qu’elle trouve erronée et qui d’ailleurs l’est bien souvent.

J’ai d’ailleurs eu moi aussi dans ma jeunesse des velléités de porter une parole militante, prosélyte et engagée parce qu’il me semblait que c’était une urgence nécessaire. Mais ce sentiment d’urgence nécessaire qui brûle la langue et l’âme et apportes à nos mots une emphase et un phrasé prompte à affronter le monde n’est pas le fruit de posture intellectuelle, c’est le fruit de l’adolescence. Et à ce titre d’ailleurs c’est une parole respectable, aussi respectable qu’elle est nécessaire. Mais c’est une parole qui connait des limites, celles de sa subjectivité et de son partisanisme, limites qui découlent généralement de sa condition de parole urgente qui lui confère une large dimension de parole pulsionnelle.

Mais cette parole militante ne devrait jamais être une fin, elle devrait toujours n’être qu’un point de départ ; sous entendant ainsi que cette parole militante devrait toujours être en mesure d’évoluer, de s’hybrider, se modifier et avancer vers une un discours moins pulsionnel et plus intellectualisé. Et c’est là que la parole militante m’irrite. Elle semble attendre de son interlocuteur qu’il s’embrase pour la cause exprimée, qu’il s’ébranle, qu’il se sente concerné et qu’il l’exprime par un témoigne émotionnel. Mais cette parole militante étant une parole limitante et limitée, une parole pulsionnelle nécessaire mais insuffisante, j’ai tendance à lui préférer une réflexion plus globalisante, nécessitant quand à elle de faire quelques pas de côtés pour prendre du recul et apaiser l’émotivité afin de faire ré émerger la raison. Il m’est donc difficile de m’émouvoir de la parole limitante, qui pourrait très souvent toujours être réduite à une lutte de la société contre l’inculture, l’arriérisme et l’étroitesse d’esprit et pour la tolérance, le bon sens et une part d’esprit critique.

Racisme, sexisme, antisémitisme, radicalisme, grossophobie, transophobie, défense écologique, défense de la condition animale, égalité salariale, etc. trouvent des racines communes dans l’incurie intellectuelle de notre société et toutes ces luttes aussi nécessaires que vitales devraient passer par un socle commun construit sur l’éducation, la culture, l’esprit critique et les humanités. Cette pensée aussi simple mais complexe à mettre en place dans notre société devrait supplanter toutes les paroles militantes pour reconstruire à la base les fondations de notre société et c’est pour cela que la petitesse partisane d’une parole militante m’ennuie.

Je ne dis pas que la parole militante est néfaste ou qu'elle devrait disparaître. Elle est un pilier essentiel de notre société intellectuelle, elle doit permettre de viser les problèmes, d'envisager des solutions, mais la parole militante ne devrait pas être la seule à être exprimée, entende, véhiculée. La vie intellectuelle d'une société devrait être plus vaste que la simple sphère militante ou politique afin d'intégrer, digérer et faire avancer le débat. C'est ce qui manque, ce qui me manque dans notre société contemporaine

Petitesse et étroitesse de la parole militante

Publié dans Réflexion

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