1601 ème jour : Le moi nu

Je suis le même, je suis ici moi-même, juste moi, rien que moi, l'entière présence de moi, un moi nu, un moi mise à nu, je suis les mots que je dis.

En même temps ce que je viens de dire est un mensonge. Ceci est un blog, ceci est un article, ceci est un avatar, le cri ou le crachat d’un avatar ; c'est une vérité, je suis sincère, je suis naturel et entier, mais la vérité c'est que je ne suis pas que des mots. Dans la vie du monde je suis aussi un corps - commun -, une voix, une odeur, une peau, des vêtements - parfois non -, je suis des tensions, des émotions, des dépressions, je suis des envies, des fantasmes, des gestes, des mouvements, des postures, des silences, des postions, je suis un tas de chose, un tas de graisse, d'os, de poils, un tas d'idées, je suis un tas de choses différentes.

Je voudrais vraiment, en tout cas parfois, être le même dans la vie du monde que dans la vie des réseaux. Je voudrais croire que je suis le même, l’Unique, je voudrais le croire, même je ne suis pas dupe, il y a un des deux Moi, du virtuel et du réel, qui est plus moi que l’autre ; je suis un peu moins-moi dans ma vie quotidienne que dans ma vie immatérielle, tel est le drame de ma presque vie quotidienne.

D'une certaine façon pourtant le physique est le miroir de nos personnalité, en tout cas il reflète des choses, nous incarnons des choses que nous sommes. Mais ne limitons pas le physique à une image, mais bel et bien à un corps en mouvement dans un espace social. Ce que nous sommes c’est de la chaire & des os qui parlent de nous ; parfois de manière directe, une personne grande est grande, un gros est gros, parfois en détournée et il faut savoir alors lire entre les lignes de nos corps ; ligne de vie, la courbe de nos formes, la ligne d'une silhouette, la ligne d'un regard, la ligne que l'on suit pour se déplacer dans la pièce.

En même temps le corps ne peut dire qu'une partie tronquée de ce que nous sommes, le corps parle bien sûr, mais il n'est pas un vrai miroir de nos personnalités, il ne reflète qu'une part de nous que des fragments. Et c'est sûrement pour ça que l'on ne peut pas juger avec justesse une personne seulement sur son physique, de la même façon qu'il est difficile d'être exhaustif dans notre jugement si on ne juge que les mots déconnectés du réel de la personne.